Aller au contenu

Page:Prieur - Notes d'un condamné politique de 1838, 1884.djvu/12

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
12
notes d’un condamné politique.

d’instruments de ferme transformés en engins de guerre.

Notre campagne devait s’ouvrir, le matin même, par la prise d’un bateau à vapeur (Le Brougham je pense) qui, à cette époque, faisait le trajet entre Lachine et les Cascades. On imaginait que les autorités militaires ne manqueraient pas de se servir de ce bateau pour transporter les troupes, et le bruit courait même que ce vapeur venait d’être armé de deux canons et muni d’une escouade de soldats, afin d’en assurer l’usage au gouvernement. Il parut donc important de ne pas remettre à un autre jour la tâche de s’en rendre maître, et il fut résolu qu’on s’en emparerait le jour même, qui était celui de son passage à Beauharnais, descendant à Lachine.

Comme nous nous attendions à une vigoureuse résistance, nous prîmes plus de précautions que n’en aurait comporté l’attaque d’un simple bateau du commerce. Deux heures furent employées à organiser nos préparatifs, et quand le vapeur fit son apparition, à six heures du matin, ce même jour du 4 Novembre, nous avions des piquets postés dans diverses parties du village, une centaine d’hommes dans les maisons voisines du quai et cinquante hommes, sous mes ordres, placés à l’abri d’un hangar sur le quai même.

Dès que le bateau fut fixé au quai par ses amarres, je donnai le signal, et, courant à toutes jambes, nous fûmes en un instant sur le pont du