Page:Procès verbaux des séances de la Société littéraire et scientifique de Castres, Année 1, 1857.djvu/43

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qui explique pourquoi tant d’esprits ingénieux et pénétrants, ont essayé de saisir tous ses secrets et de dévoiler tous ses mystères. Les fables de La Fontaine ont donné lieu à des volumes de notes, d’observations, de jugements et d’éloges. Venir après les critiques les plus fins du xviiie siècle, les observateurs les plus délicats de nos jours, essayer d’ajouter encore quelque chose à ce tribut d’admiration qu’impose le génie, ce n’est pas une petite difficulté.

M. Cavagnac a soumis ses études à une idée générale. La Fontaine n’a pas travaillé au hasard, sans principe et sans but. La fable n’est pas pour lui, elle ne doit pas être pour le lecteur, une simple distraction, un amusement de bon goût. Elle est une indication utile, une leçon pratique, un enseignement moral. Cette série de tableaux si différents par le caractères, si variés pour le fond, si riches en tons et en couleurs, a dû être rattachée par un lien commun, par une pensée d’ensemble. On s’en aperçoit en lisant plusieurs fables de suite. Elles se rapportent à la vie privée, à la vie politique ou à la vie sociale. Quoiqu’elles ne soient pas classées dans cet ordre, et que l’on passe rapidement, — ce qui est loin de nuire à l’intérêt, — d’un genre à l’autre, il est facile de se convaincre que la pensée de La Fontaine est allée progressivement de l’individu à l’État, de l’État à la société.

L’indication de ce but est déjà sensible dans les six premiers livres publiés en 1668. Il n’est pas possible d’en méconnaître le développement dans les six derniers, dont la publication ne fut terminée qu’en 1679.

La Fontaine vieillissait. Son observation mûrie par l’expérience, avec un but plus élevé, semblait avoir de plus hautes prétentions. N’est-ce pas ce qu’il a voulu constater dans ces quatre vers par lesquels il termine la dernière fable de son 12e livre ?

Cette leçon sera la fin de ces ouvrages :
Puisse-t-elle être utile aux siècles à venir !
Je la présente aux rois, je la propose aux sages ;
Par où saurais-je mieux finir ?