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le wagnérisme en france avant la guerre

par Jacques Saint-Cère, dans le Figaro du 16, des lettres de Wagner à Mme Wille, ne firent qu’envenimer le débat. Le même jour, Lamoureux assignait Peyramont, rédacteur en chef de la Revanche, en 25000 francs de dommages-intérêts pour le préjudice qu’il lui causait par ses attaques. Alors, ce journal devint implacable. Du 19 au 22 avril, il publia une traduction de Une Capitulation, un article sur l’Esthétique wagnérienne en amour, d’après les lettres traduites par Saint-Cère, etc., etc. Lamoureux, malgré tout ce bruit, annonçait, le 21, la première représentation pour le 23 ; il n’y aurait pas de répétition générale pour la presse. Le 22 au matin, Paris connaissait les incidents survenus à la frontière franco-allemande.

« Pendant que les Allemands arrêtent sur notre frontière des fonctionnaires français, s’écrie la Lanterne du lendemain, certains Français à Paris s’apprêtent à faire à un musicien allemand une apothéose.

« Oui, samedi, quelques artistes unis à une colonie cosmopolite, acclameront Wagner, l’insulteur de Paris et de la France.

« Il y a des gens qui ont des préoccupations artistiques — ou commerciales — si grandes qu’ils en oublient la patrie. »

Lamoureux crut donc nécessaire d’ajourner, « dans les circonstances actuelles », la représentation. Il en fit part à la presse le 23 avril au soir.

Le président du Conseil des ministres avait mandé le chef d’orchestre pour le prier de remettre jusqu’à nouvel ordre la représentation. On fit courir le bruit qu’il avait reçu une indemnité du gouvernement. Le mardi, il réunit son personnel dans l’avant foyer des