Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/348

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une telle presse ? Le public a été empoisonné d’idées fausses, engourdi dans ses préjugés ; tous les intérêts mis en souffrance, la paix de l’Europe à chaque instant compromise, les masses surexcitées, le Gouvernement, enfin, sous tous les régimes, discrédité, ruiné dans l’opinion, et cela toujours au moment où il semblait mériter l’indulgence du pays. On crie contre la répression : comparée à la multitude des méfaits, à la profondeur de l’immoralité, elle est insignifiante. Mille années de prison et cent millions d’amende n’expieraient pas les crimes de la presse seulement depuis le 2 Décembre.


Contre ce débordement on ne connaît pas de remède. La règlementation n’y peut rien. La presse est de droit industrie libre, dans laquelle le Gouvernement n’a pas à intervenir. Les lois relatives à l’exercice de la profession d’imprimeur et de libraire sont des lois d’exception, contraires au droit des citoyens, de qui seuls relèvent les choses de l’ordre économique, et en opposition avec le grand principe constitutionnel qui a fait de la faculté de contrôle l’une des garanties de la nation. Pendant tout le règne de Louis-Philippe et pendant la République, les journaux avaient joui de la faculté illimitée de rendre compte à leur manière des débats du parlement : on sait à quel point fut poussé à ce propos l’art du travestissement et de la calomnie. Le Gouvernement impérial voulut mettre un terme à cette mauvaise foi : le moyen était simple, c’était d’imposer aux journaux le silence, ou la reproduction pure et simple du Moniteur. Mais c’était poser un principe qui pouvait mener loin. L’Opposi-