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Page:Proudhon - De la Capacité politique des classes ouvrières.djvu/63

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quis la conscience d’elle-même. Mais l’instinct de déférence est encore puissant chez elle ; l’opinion qu’elle se fait de ce que l’on nomme capacité est singulièrement fausse et exagérée ; ceux qui jadis étaient ses maîtres, qui ont conservé sur elle le privilège des professions appelées libérales, auxquelles il serait temps d’ôter ce nom, lui semblent toujours avoir 30 centimètres de plus que les autres hommes. Ajoutez ce ferment d’envie qui s’empare de l’homme du peuple contre ceux de ses pareils qui aspirent à s’élever au-dessus de leur condition : comment s’étonner après cela que, déjà transformé dans sa conscience, dans les nécessités de sa vie, dans les idées fondamentales qui le dirigent, le Peuple ait conservé ses habitudes d’abnégation ? Il en est des mœurs comme du langage : elles ne changent pas avec la foi, la loi et le droit. Nous resterons longtemps encore les uns vis-à-vis des autres Messieurs et très-humbles serviteurs : cela empêche-t-il qu’il n’y ait plus ni messieurs ni serviteurs ?

Cherchons donc dans les idées et dans les faits, en dehors des adorations, génuflexions et superstitions vulgaires, ce que nous devons penser de la capacité et de l’idonéité politique de la classe ouvrière comparée à la classe bourgeoise, et de son futur avénement.

Observons en premier lieu que le mot capacité, en parlant du citoyen, se prend à deux points de vue différents : il y a la capacité légale, et la capacité réelle.

La première est conférée par la loi et suppose la seconde. On n’admettrait pas que le législateur reconnût des droits à des sujets frappés d’incapacité naturelle. Par exemple, avant 1848, il fallait pour exercer le droit électoral payer 200 fr. de contributions directes. On supposait donc que la pro-