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CHAPITRE VI.

Le Travail s’affranchira-t-il, ou ne s’affranchira-t-il pas ?

XLIV

La question de l’affranchissement du travail, à laquelle le vieux monde ne peut plus échapper, crée pour notre époque une situation tout à fait dramatique.

Si la justice devenait pour tout le monde, non plus une idée en l’air ou un commandement divin, mais la plus grande réalité de l’existence ;

Si, conséquemment à ce principe, la balance des services et des valeurs était faite ;

Si les forces collectives, aliénées au profit de quelques exploitants, revenaient aux propriétaires légitimes ;

Si le Pouvoir social, prétexte de tant de bouleversements, achevait de se constituer sur ses bases certaines ;

Si l’éducation était égale pour tous, fondée en Justice, non en mysticisme ;

Si le travail, enfin, était affranchi par la double loi de l’exercice intégral et de l’admission à la maîtrise,

En moins de deux générations tout vestige d’inégalité aurait disparu. On ne saurait plus ce que c’était que noble, bourgeois, prolétaire, magistrat ou prêtre ; et l’on se demanderait comment de pareilles distinctions, de semblables ministères, ont pu exister parmi les hommes.

Quel revirement d’idées ! et pour les sectateurs de l’ancienne foi, quelle subversion !…

Suivons notre propos.

L’inégalité n’aurait plus même de prétexte dans la différence des esprits ; le travail manuel, dans les condi-