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Page:Proudhon - De la justice dans la Révolution et dans l’Église, tome 3.djvu/517

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carne et impalpable. L’Israélite, à la tête dure, au cœur incirconcis, n’aurait rien compris à ce dieu-là ; il aurait cru qu’on se moquait de lui, et il se serait bientôt moqué lui-même de la loi.

C’est donc d’une exhibition positive, réelle, matérielle, de la divinité qu’il s’agit, nullement d’une démonstration dialectique. Vous parlez de Dieu au Juif ; il demande à le voir. Telle est la pensée qui remplit la première partie du psaume xviii, si étrangement défigurée par les interprètes.

Je traduis mot à mot, sur l’original :

1. Les cieux déroulent la gloire du dieu.
__Et le firmament étale l’œuvre de ses mains.

2. Le jour bouillonne au jour son verbe ;
__La nuit souffle à la nuit son idée.

3. Ce ne sont phrases ni paroles :
__Leur voix ne s’entend pas (par les oreilles) ;

4. C’est une corde qui résonne par toute la terre.
__Un chant qui atteint aux bornes du monde.

5. Au fond du ciel est dressée la tente du soleil ;
__Le voilà, comme l’époux qui se lève de sa couche.
__Comme le héraut d’armes qui part pour un message.

6. D’une extrémité du ciel il s’élance,
__Et il court à l’autre extrémité,
__Et nul ne peut se dérober à sa flamme.

On a vu dans ces six distiques une sorte d’argument de l’existence de Dieu d’après le principe de causalité, comme si le psalmiste avait dit : Tout ordre suppose un architecte ; or, il y a de l’ordre dans l’univers ; donc… Quelle pitié ! Il s’agit bien de raisonner avec le Juif, qui veut voir ! Et la belle raison à lui donner de l’invisibilité de Dieu, que son immatérialité !

Ici, le poëte procède juste à rebours de ce que lui font dire les commentateurs :

Vous demandez à voir Jéhovah : je m’en vais vous le montrer.

Regardez le ciel : voilà sa gloire. — La gloire, c’est-à-dire l’amplitude, d’où l’épithète amplissimus, synonyme de gloriosissimus, donnée aux grands personnages. Dans la signification