Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/126

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dix ou quinze ans, une brochure sous ce titre : Débâcle de la politique en France ; comment M. Ledru-Rollin, qui, en se rattachant à la Constitution de 93, a fait de si généreux et si inutiles efforts pour la rendre praticable, et faire du Gouvernement direct une chose de sens commun ; comment, dis-je, ces messieurs n’ont-ils pas compris que les arguments dont ils se prévalent contre le gouvernement indirect n’ont de valeur qu’autant qu’ils s’appliquent aussi au gouvernement direct ; que leur critique n’est admissible qu’à la condition d’être absolue ; et qu’en s’arrêtant à moitié chemin, ils tombent dans la plus pitoyable des inconséquences ? Comment n’ont-ils pas vu, surtout, que leur prétendu gouvernement direct n’est autre chose que la réduction à l’absurde de l’idée gouvernementale, en sorte que si, par le progrès des idées et la complication des intérêts, la société est forcée d’abjurer aujourd’hui toute espèce de gouvernement, c’est justement parce que la seule forme de gouvernement qui ait une apparence rationnelle, libérale, égalitaire, le gouvernement direct, est impossible ?…

Entre-temps est arrivé M. de Girardin, qui, aspirant sans doute à une part d’invention, ou tout au moins de perfectionnement, a proposé cette formule : Abolition de l’Autorité par la Simplification du Gouvernement. Qu’allait donc faire M. de Girardin dans cette maudite galère ? Cet esprit, de tant de ressource, ne saura donc jamais se contenir ! Vous êtes trop prompt, M. de Girardin, vous n’engendrerez pas. L’Autorité est au Gouvernement ce que la pensée est à la parole, l’idée au fait, l’âme au corps. L’Autorité est le Gouvernement dans son principe, comme le Gouvernement est l’Autorité en exercice. Abolir l’un ou l’autre, si l’abolition est réelle, c’est les détruire à la fois ; par