Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/264

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

droit. Recommander, imposer l’association dans des conditions semblables, ce serait refaire malheureusement, par un esprit mesquin et jaloux, les corporations féodales qu’a détruites la Révolution ; ce serait mentir au progrès et rétrograder, chose impossible. Là n’est pas l’avenir de l’association, considérée comme institution économique et révolutionnaire. Aussi ne puis-je que répéter en ce moment ce que j’ai dit ailleurs : les compagnies ouvrières qui se sont formées à Paris pour des industries de ce genre, de même que les chefs de maisons qui ont associé leurs employés à leurs bénéfices, doivent se considérer comme servant la Révolution à un tout autre point de vue et pour un autre objet. J’y reviendrai tout à l’heure.

Mais lorsque l’entreprise requiert l’intervention combinée de plusieurs industries, professions, spécialités différentes ; lorsque de cette combinaison ressort une œuvre nouvelle, impraticable à toute individualité, où chaque homme s’engrène à l’homme comme la roue à la roue, où l’ensemble des travailleurs forme machine, comme le rapprochement des pièces d’une horloge ou d’une locomotive : oh ! alors les conditions ne sont plus les mêmes. Qui donc pourrait s’arroger le droit d’exploiter une pareille servitude ? Qui serait assez osé que de prendre un homme pour marteau, un autre en guise de pelle ; d’employer celui-ci comme crochet, celui-là comme levier ?

Le capitaliste, dira-t-on, court seul les risques de l’entreprise, de même que le maître bottier dont nous parlions tout à l’heure. Sans doute, et cela est juste ; mais la parité ne va pas plus loin. Est-ce que le capitaliste tout seul pourrait exploiter une mine ou faire le service d’un chemin de fer ? Est-ce qu’un homme seul pourrait faire marcher une manufacture, monter