Page:Proudhon - La Révolution sociale démontrée par le coup d’État du 2 décembre.djvu/105

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et la religion. D’où je conclus, que l’humanité ne pouvant subsister que dans un perpétuel mouvement, la religion, supposée éternelle et immuable, n’est pas faite pour elle : si cette religion est vraie, l’humanité n’existe pas ; et, réciproquement, si l’humanité n’est point une chimère, la religion est impossible.

Telle était ma question très-instante, et voici quelle était la réponse de mon interlocuteur. Il n’admettait pas, bien entendu, en sa qualité de prêtre, que la révélation chrétienne fût soumise, comme les pensées des hommes, à la loi de progrès : pour lui la religion existait de toute éternité, comme Dieu. Mais cette faculté d’évolution, qu’il rejetait dans le christianisme, il l’admettait dans la société, et c’est par le mouvement, très-réel, il l’avouait, de celle-ci, qu’il rendait raison du mouvement apparent de celui-là. L’humanité ne faisait ainsi que traverser la révélation et s’immerger, en passant, dans le sang de Jésus-Christ. Quant à concilier la perpétuité et l’indéfectibilité de l’Église avec son règne transitoire, il le faisait à l’aide de la théorie de la grâce appliquée à la pluralité des mondes, entendant ainsi, de l’Univers entier, ce qui, dans l'Écriture et les Pères, semble dit seulement de l’habitation terrestre, πασής οίΧουμενής.

Le christianisme, disait-il, est éternel et immuable, comme son auteur. Mais l’humanité est évolutive et changeante, comme tous les êtres vivants. C’est pour cela qu’elle n’était capable de recevoir la révélation chrétienne que dans un âge relativement avancé ; qu’elle l’a exprimée ensuite peu à peu ; qu’en se débattant sous cet enseignement surnatu-