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Page:Proudhon - Manuel du Spéculateur à la Bourse, Garnier, 1857.djvu/177

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qui en a demandé deux cents en obtient vingt, ce qui tend déjà à produire un excellent effet. De leur côté, les acheteurs, qui, il faut bien le dire, sont toujours complices du tour qu’on leur joue, s’empressent de demander plus de titres qu’ils n’ont réellement le désir d’en avoir ; mais afin d’obtenir à peu près ce qu’ils désirent, ils enflent ainsi leur demande : ce qui donne lieu de publier, ce qui se trouve vrai, que les demandes ont été aux actions disponibles comme dix, vingt contre un. Nouveau mouvement de recherche.

« Alors les fondateurs écrivent aux souscripteurs pour leur faire connaître le nombre d’actions mis à leur disposition. Ce sont ces lettres qu’on appelle promesses d’actions.

« Aussitôt parties, elles deviennent un sujet de transaction. On les vend, on les achète, c’est-à-dire que, moyennant une différence qu’on paye comptant au bienheureux porteur, on se met en ses lieu et place, et qu’on lève les actions contre leur capital nominal lors de leur émission.

« Il arrive très-souvent que l’on n’attend pas ces lettres pour opérer sur les actions des sociétés nouvelles, et qui ne sont pas encore nées. On trouve beaucoup de gens pour vendre à découvert, moyennant une prime, les titres à livrer à l’émission.

« Cependant les fondateurs soutiennent ces transactions en rachetant bonne partie de ces lettres : ce qui en augmente la valeur de moment en moment.

« Enfin l’émission est annoncée : les titres commencent à paraître sur la place ; des ventes et des achats faits à propos sur ces titres, qui sont encore en petit nombre, en élèvent les cours à des taux fabuleux. C’est alors que les fondateurs s’empressent de réaliser les actions réservées, par petite partie, par des ventes au comptant, tandis qu’ils maintiennent les cours par des achats de primes à de forts écarts, primes qu’ils abandonnent en temps utile ; c’est alors que tout est mis en œuvre pour donner les plus belles espérances de l’entreprise. » (Almanach de la Bourse de 1856.)

Le rapport du conseil d’administration du chemin de fer du Nord, en 1846, relève les chiffres suivants :

« Du 28 octobre 1845 au 31 janvier 1846, il a été transféré 571,741 actions, c’est-à-dire un nombre égal à une fois et demie le nombre total des actions émises.

« Ces transferts ont présenté cette circonstance favorable, que les actions, en se classant, se sont constamment divisées, et que, pour la même quantité d’actions vendues, le nombre des acheteurs a été régulièrement deux fois plus considérable que celui