Page:Proust - Contre Sainte-Beuve, 1954.djvu/108

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l’intérêt, malgré la manière et les invraisemblances. Il y a là une idée. Beyle avait, pour ce commencement du roman, un exemple précis, m’assure-t-on, dans quelqu’un de sa connaissance et, tant qu’il s’y est tenu, il a pu paraître vrai. La prompte introduction de ce jeune homme timide dans ce monde pour lequel il n’a pas été élevé, etc., tout cela est bien rendu ou, du moins, le serait si l’auteur, etc… Ce ne sont pas des êtres vivants, mais des automates ingénieusement construits… Dans les nouvelles, qui ont des sujets italiens, il a mieux réussi… La Chartreuse de Parme est, de tous les romans de Beyle, celui qui a donné à quelques personnes la plus grande idée de son talent dans ce genre. On voit combien je suis, à l’égard de La Chartreuse de Beyle, loin de partager l’enthousiasme de M. de Balzac. Quand on a lu cela, on revient, tout naturellement il me semble, au genre français, etc… On demande une part de raison, etc., telle que l’offre l’histoire des Fiancés de Manzoni, tout beau roman de Walter Scott ou une adorable et vraiment simple nouvelle de Xavier de Maistre  ; le reste n’est que l’œuvre d’un homme d’esprit.  »

Et cela finit par ces deux paroles  : «  En critiquant ainsi, avec quelque franchise, les romans de Beyle, je suis loin de le blâmer de les avoir écrits. Ses romans sont ce qu’ils peuvent, mais ils ne sont pas vulgaires. Ils sont, comme sa critique, surtout à l’usage de ceux qui en font…  » Et ces mots par lesquels l’étude finit  : «  Beyle avait, au fond, une