Page:Proust - Contre Sainte-Beuve, 1954.djvu/133

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en lui tout de même l’auteur, sinon de second ordre, du moins sans génie vraiment déterminé, créant sa forme d’art en même temps que sa pensée – que ses vers et ses nouvelles ne sont (comme les Petits Poëmes en prose de Baudelaire et Les Fleurs du Mal, par exemple) que des tentatives différentes pour exprimer la même chose. Chez de tels génies la vision intérieure est bien certaine, bien forte. Mais, maladie de la volonté ou manque d’instinct déterminé, prédominance de l’intelligence qui indique plutôt les voies différentes qu’elle ne passe en une, on essaye en vers, puis pour ne pas perdre la première idée on fait en prose, etc.

On voit des vers qui expriment presque la même chose. De même que dans Baudelaire nous avons un vers  :

Le ciel pur où frémit l’éternelle chaleur


et dans les Petits Poèmes en prose correspondant  :

Un ciel pur où se perd l’éternelle chaleur,


de même, vous avez déjà reconnu dans ce vers que je citais à l’instant  :

Et la treille où le pampre à la rose s’allie


la fenêtre de Sylvie  :

où le pampre s’enlace aux rosiers