Page:Proust - Contre Sainte-Beuve, 1954.djvu/152

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Viennet  ? N’était-ce rien de la part de Sainte-Beuve, grand ami de Baudelaire, que d’avoir donné des conseils à son avocat, à condition que son nom ne fût pas cité, d’avoir refusé tout article sur Les Fleurs du Mal, même sur les traductions de Poe, mais enfin d’avoir dit que la Folie Baudelaire, était un charmant pavillon, etc.  ?

Sainte-Beuve trouvait que tout cela, c’était beaucoup. Et ce qu’il y a de plus effrayant – et qui vient bien à l’appui de ce que je disais –, si fantastique que cela puisse paraître, Baudelaire était du même avis. Quand ses amis s’indignent du lâchage de Sainte-Beuve au moment de son procès et laissent percer leur mécontentement dans la presse, Baudelaire est affolé, il écrit lettre sur lettre à Sainte-Beuve, pour le bien persuader qu’il n’est pour rien dans ces attaques, il écrit à Malassis et à Asselineau  : «  Voyez donc combien cette affaire peut m’être désagréable… Babou sait bien que je suis lié avec l’oncle Beuve, que je tiens vivement à son amitié, et que je me donne moi la peine de cacher, mon opinion quand elle est contraire à la sienne, etc. Babou a l’air de vouloir me défendre contre quelqu’un qui m’a rendu une foule de services.  » (  ?) Il écrit à Sainte-Beuve que loin d’avoir inspiré cet article, il avait persuadé à l’auteur «  que vous (Sainte-Beuve) faisiez toujours tout ce que vous deviez et pouviez faire. Il y a encore peu de temps que je parlais à Malassis de cette grande amitié qui me fait honneur, etc.  »