Page:Proust - Contre Sainte-Beuve, 1954.djvu/167

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Le son de la trompette est si délicieux
Dans ces soirs de célestes vendanges…


Le vin, non pas seulement dans toutes les pièces divines où il est chanté depuis le moment où il mûrit

sur la colline en flammes


jusqu’au moment où la « chaude poitrine » du travailleur lui est une « douce tombe », mais partout où lui, et tout élixir, toute végétale ambroisie (une autre de ses personnelles et délicieuses préparations), entre secrètement dans la fabrication de l’image, comme quand il dit de la mort qu’elle

nous monte et nous enivre,
Et nous donne le cœur de marcher jusqu’au soir.

Les horizons bleus où sont collées des voiles blanches

Brick ou frégate dont les formes au loin
Frissonnent dans l’azur


Et la négresse, et le chat, comme dans un tableau de Manet… Du reste est-il rien qu’il n’ait peint ? J’ai passé les tropiques, comme un aspect trop connu de son génie, au moins trop connu de nous deux, puisque j’ai eu tant de mal à t’habituer à La chevelure, mais n’a-t-il pas peint le soleil dans son enfer polaire comme «  un bloc rouge et glacé  » ?