Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/44

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système de coordonnées rectilignes qu’il s’est construit…

Il est des matins si lourds, si lointains qu’il nous semble que nous baignons à plein dans la beauté du monde. Dans la pire des vulgarités, nous restons purs, et nous sentons que rien de ce qui est beau en nous ne se perdra. Alors la solitude nous exalte ; elle nous fait oublier tout ce que nous avons appris de méchant à travers la vie. Timothée était ainsi. Le matin, ivre de ses muscles, il serait parti à la conquête des étoiles, tandis que certains soirs il s’étirait d’ennui de ce que tant d’animale vigueur restât encore inemployée en lui, après tout un jour.

Nangès, cet homme d’âge, chantait, tandis qu’il revenait au quartier d’artillerie. Il lui semblait qu’il n’avait point encore fait assez attention à cette austère beauté, antique et militaire, qui éclate à chaque pas depuis le pont-levis de l’antique citadelle jusqu’aux logis de l’artillerie.

Sa visite à Voulangis était trop proche pour qu’elle put être pour lui un souvenir. Pourtant elle dominait sa vie à son insu et l’emplissait de mille sonorités confuses, à peine har-