Page:Psichari - L'Appel des armes (1919).djvu/80

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ami, l’illustre Servat, avait ses amitiés politiques. Comme il tapotait sur la vitre en attendant que le maître eût terminé son « papier », il entendit soudain que l’on parlait d’un discours récemment prononcé par un sénateur français en plein Berlin. Cet homme avait assuré aux Allemands que nous, Français, nous ne leur en voulions pas du tout, que nous les aimions bien, et qu’il fallait s’embrasser. Cet homme, qui portait un nom respecté, qui était d’opinions modérées, qui pouvait en somme apparaître aux Berlinois comme un représentant très digne de la conscience française, qui n’était ni un sectaire, ni un démagogue, mais qui était un homme sage, moyen, représentant l’opinion moyenne, cet homme avait pris le train, avait fait un voyage fatigant, en somme, pour un sénateur, cet homme d’âge, cet homme de poids, cet homme important s’était déplacé pour assurer les Allemands que vraiment nous ne leur en voulions pas, au contraire ; que nous serions bien sages, maintenant ; que nous tendrions l’autre joue, plutôt que… Voilà ce qu’un sénateur de France était allé dire à un public de Berlin.