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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/17

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PHYLLIS

— J’y suis, dit M. Carrington du ton dont les enfants font cou-cou, quand ils jouent à cache-cache.

Il s’était éloigné de plusieurs pas et il paraissait prendre un grand intérêt au paysage qu’il avait sous les yeux.

Je me tournai avec précaution. Certainement, ma robe de mousseline mettait de la malice à s’accrocher à toutes les branches, des paquets de noisettes tombaient de l’arbre secoué violemment.

— Quel bonheur que je ne sois plus dessous ! me dit M. Carrington sans se retourner. Quelle avalanche !

Trouvant cette réflexion déplacée en un moment aussi critique, je pinçai la bouche sans répondre, mon bras passé autour du tronc rugueux, j’allais me laisser glisser quand…

Je ne pus embrasser le tronc assez vite avec mes deux genoux et je tombai lourdement à terre en poussant un cri.

M. Carrington se précipita à genoux auprès de moi, il souleva ma tête et passa son bras autour de ma taille pour me relever.

Je ne m’étais presque pas fait de mal et je crois bien que c’est pour me rendre un peu intéressante que je poussai deux ou trois faibles gémissements. D’autant plus que Billy s’était décidé à reparaître subitement, et me regardait d’un air consterné. Je n’étais pas fâchée, en l’inquiétant, de le punir de son « lâchage ».

M. Carrington s’écria tout à coup comme s’il s’agissait d’un grand malheur.

— Mais vous êtes blessée ! Votre bras saigne !

En effet, une tache de sang étoilait la mousseline de ma manche, un peu au-dessus du coude.

— Voilà ce que c’est, dis-je à Billy, si tu m’avais aidée !

Relevant ma manche avec d’infinies précautions, M. Carrington découvrit mon bras où il y avait une longue égratignure rouge.

— Oh ! c’est affreux ! s’écria-t-il. Le pauvre petit bras…

« J’ai été à la guerre, je suis un peu infirmier, laissez-moi vous faire un bandage.

Se servant de son mouchoir, il arrêta le sang de ma blessure, puis la banda avec la plus extrême délicatesse.

Que n’eût pas donné Dora pour se trouver à ma place !

— Pourquoi n’as-tu pas voulu que M. Carrington te descende dans ses bras, dit Billy, est-ce que cela n’eût pas mieux valu ?