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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/175

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PHYLLIS

montre de son gousset et la regardait tranquillement.

— Il faudrait vous dépêcher si vous voulez le rattraper. Mark Carrington faisait ses malles quand je l’ai vu. C’était… hier soir. Aujourd’hui, il est à Boulogne et ce soir il sera à Calais. Si vous axez l’intention de courir après ce cher mari…

Je sentis le sang se retirer de mon cœur et ne pus que balbutier en montrant la porte :

— Sortez, monsieur, sortez…

Et je tombai comme une masse appuyée à la table.

Parti ! Il était parti !

. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Mère me retrouva à la même place un long temps après. Je n’avais pas de larmes, j’étais insensible et me laissai emmener dans ma chambre sans rien dire.

Vers le milieu de la nuit seulement, je recouvris complètement la conscience des choses, avec le souvenir de ce qui s’était passé.

Et je compris pourquoi je me répétais inlassablement :

— Une explication… une explication.

C’est qu’il me fallait une explication à tout prix. Je voulais savoir si Francis Garlyle m’avait menti, s’il avait vu Mark et ce que celui-ci pensait réellement.

Le souvenir de sa lettre me revint tout à coup.

Je me dressai, fis la lumière et fouillai dans le tiroir proche de mon lit. Elle y était toujours.

Voici ce qu’il me disait au lendemain du jour où mère lui fit défendre sa porte.

« Strangemore.

« Pour la dixième fois je reviens de Summerleas où l’on me défend de vous voir. Phyllis, est-ce vous qui êtes aussi cruelle de votre plein gré ou est-ce madame votre mère qui impose sa volonté devant laquelle je me vois forcé de m’incliner. Mais pensez, ma Phyllis aimée, que vous savoir malade et rester loin de vous me rendra fou de douleur !

« Je croyais avoir souffert tout ce qu’un homme peut endurer sans mourir, l’autre soir, quand je rentrai à la maison et vous trouvai partie. Je pensai d’abord que vous aviez été voir votre mère et vous étiez attardée, puis l’inquiétude me gagna, je questionnai les domestiques et j’appris ce qui était arrivé.

« Ah ! croyez-le, je le jure sur l’amour profond et inaltérable que je vous ai voué, ma bien-aimée, j’eusse donné vingt ans de ma vie pour avoir réussi à écarter de vous la personne que vous avez vue et