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PHYLLIS

ment pourrais-je en douter après ce que j’ai vu ? — je trouve qu’il s’est conduit abominablement envers moi.

— Comment cela ? balbutiai-je.

— Comment ? dit-elle d’un air indigné, alors, pourquoi est-il venu ici tous les jours nous faire des visites interminables ?

« Pourquoi nous faisait-il envoyer des fleurs et des fruits de ses serres ? des lièvres de sa chasse ? s’il n’avait pas d’intentions à mon égard ?

« Si tu n’étais pas aussi bornée que tu l’es, ma pauvre Phyllis, cela te sauterait aux yeux… C’est une action abominable !

— Évidemment, cela me semble étrange. Mais si tu te trompais ? Qui sait si ce n’était pas des cheveux de sa sœur qu’il embrassait par affection ?

— Ah ! quelle sottise ! fit amèrement Dora. Crois-tu que Roland ou Billy mettraient de nos cheveux dans un médaillon pour les embrasser à la dérobée ? Non, te dis-je, cette personne, il la dévorait des yeux, ou il la regardait avec un sourire vague… un sourire idiot !

« Ah ! c’était bien la peine de… de…

Elle eut un gros sanglot et la cinquantième larme s’écrasa sur son corsage.

— Je vais tout dire à papa, reprit-elle avec plus d’énergie.

« Il ne faut pas que nous continuions à faire bonne figure à ce monsieur… Un individu sans cœur qui… qui…

« Oh ! s’il pouvait quitter ce pays et ne jamais y revenir ! s’écria Dora, ses petits poings serrés, je le déteste ! je le hais !

« Je souhaite qu’il n’épouse jamais l’horrible femme du médaillon.

— Moi aussi ! me hâtai-je de répondre. Mais je demeure inquiète.


VII


Quelle mauvaise journée nous avons eue hier. Comme tout était maussade et agaçant !

Je travaillais au petit salon avec maman et Dora, celle-ci encore toute douloureuse, ponctuant chaque point d’un petit soupir, et je trouvais le temps bien long lorsque, soudain, nous entendîmes sur le sable le pas d’un cheval.

Nous relevâmes la tête, nous interrogeant du regard, mais la voix de M. Carrington demandant à parler à papa dissipa nos doutes.