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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/35

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PHYLLIS

il me vint tout à coup à l’idée que j’avais une chose désagréable à lui dire.

— Avant-hier, commençai-je lentement, à cette même place où nous sommes, quelqu’un vous a surpris en train de regarder un portrait renfermé dans un médaillon… voilà ! Alors, vous comprenez, j’avais peur… qu’on puisse croire… si vous aviez parlé de mon portrait, que c’était…

— Le vôtre ? Comment aurait-on pu imaginer une chose aussi invraisemblable ?

— Ah ! fis-je vivement, je sais bien que ce n’était pas le mien, mais enfin, il ne fallait pas le donner à supposer ! D’ailleurs, deux ou trois fois déjà, depuis ce moment-là, j’ai pensé… j’ai senti que j’avais eu tort de vous donner cette photo… sans aucune autorisation. Qu’en pensez-vous ?

— Ma chère enfant, c’est une question bien difficile à résoudre par moi… Moi qui suis si heureux de la posséder ! Je suis pour vous déjà un très vieil ami… un ami sincère, et qu’est-ce qui vous prouve que ce n’était pas justement votre portrait que l’on m’a surpris à admirer ?

Je vis que M. Carrington réprimait un sourire, et il me sembla qu’il se moquait de moi.

Je répliquai d’un ton fâché :

— Ah ! quelle sottise ! Pour quelle raison m’auriez-vous mise dans un médaillon quand vous pouvez voir l’original tous les jours ? Mais vous me racontez, cela pour vous moquer de moi et voir si je vous croirai ! Eh bien ! non, monsieur, je ne suis pas une vaniteuse, ni une coquette, et… et… Mon Dieu ! que je suis donc sotte de vous avoir parlé de tout cela !

— Pardonnez-moi, Phyllis, dit-il doucement, je n’ai jamais eu l’intention de vous offenser… Mais je pense à la figure grotesque que je devais faire hier, quand j’ai été ainsi surpris.

« Dites-moi, vous n’êtes pas curieuse d’apprendre qui était la personne du médaillon ?

— Oh ! je m’en doute ! fis-je en hochant la tête. Ce doit être cette petite fille dont vous me parliez l’autre jour, cette petite provinciale que vous aimez tant ! Est-ce vrai ?

— Vous êtes une petite sorcière ! Eh bien ! oui, vous l’avez deviné.

— Puis-je la voir ? demandai-je d’un ton suppliant, laissez-moi y jeter un petit coup d’œil ?

— Vous serez déçue, je le crains bien. Je vous avertis que je ne pourrais supporter un mot de raillerie au sujet de ma beauté.

— Non, je ne serai pas déçue. Vous avez, tant