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Page:Pujo - Phyllis, 1922.djvu/71

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PHYLLIS

— Je vous l’avais dit ? Ah !…

Il parle, mais je vois que toute la pensée de mon mari est concentrée sur ce bienheureux fusil.

— Oui, vous me l’avez dit. Rappelez-vous ! Vous disiez qu’il n’était pas brillant, ce qui signifie la même chose.

— La même chose que quoi ?… Ah ! oui, oui, oui, j’y suis ! Eh bien ! qu’en pensez-vous ? Le trouvez-vous brillant ?

— Non, mais il sait causer assez gentiment, et, en somme, il est aussi agréable qu’un autre.

— Je suis enchanté qu’il vous ait donné si bonne opinion de lui. Ashurst est un de mes bons amis… Et après tout, est-ce si important qu’un garçon n’ait jamais rien pu connaître au grec ou au latin, et qu’il ait échoué à tous ses examens ?

— Mais, je suis convaincue que, s’il l’avait bien voulu, il aurait réussi. Et, tenez — je baissai la voix, bien que nous fussions seuls — je crois qu’il conviendrait on ne peut mieux à Dora.

— Ah ! ah ! Je suis de votre avis : d’autant que Dora n’a pas inventé la poudre non plus.

— Vous vous trompez, Dora est très intelligente : elle sait lire des romans, broder au petit point, faire du crochet et un tas d’autres choses beaucoup mieux que moi.

— Vrai ? Mais alors, c’est peut-être vous qui n’êtes pas très intelligente.

Je me levai et, me dirigeant vers la porte avec dignité :

— Mark, dis-je, vous êtes grossier, je ne reste pas avec vous.

— Si vous voyez Ashurst, me cria-t-il, dites-lui que je voudrais lui parler.

— Oui, et je lui répéterai que vous avez dit qu’il était un cancre au collège.

— Dora et George sont les deux personnes les plus spirituelles, les plus intelligentes que j’aie jamais vues, dit-il en riant. Êtes-vous contente ? Votre Majesté est-elle apaisée ?

— Personne ne vous demande de mentir, monsieur.

— Mais je ne mens guère, je vous l’affirme, en disant que Dora est intelligente, car je connais au moins vingt jeunes filles qui se sont données un mal inouï dans l’espoir de devenir lady Ashurst et aucune n’en a jamais été aussi près que votre sœur l’est aujourd’hui.

— Il ne lui a pas encore demandé de l’épouser.

— Cela viendra. Tout le monde peut voir qu’il n’a qu’elle en tête, et je ne crois pas… (je vous en demande bien humblement pardon), je ne crois pas