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RÉCITS DU LABRADOR

beaucoup de vertus et d’un nombre infini de malices et de ruses qu’il croit propres à égaliser ses chances dans la lutte qu’il soutient contre les animaux.

Un chasseur, l’un des plus madrés, avait tendu une douzaine de collets à loup-cervier sur son chemin de chasse ; et, comme il connaissait l’entraînement désordonné de cet animal pour la valériane, il avait abondamment drogué sa tenture avec une infusion de cette plante dans une solution de rognon de castor et de whiskey. Le lendemain, il constata, avec ahurissement, qu’un loup-cervier était pris, pris par la queue, dans l’un de ses collets. Sa stupéfaction fut si grande qu’il négligea d’asséner un coup de manche de hache sur la tête du prisonnier, et que celui-ci s’échappa en abandonnant une partie du court organe par lequel il avait été trahi.

Je domine assez mal mes impressions, et il me fut impossible de dissimuler un certain étonnement, lorsque Laurent T… me fit le récit de cette aventure. Il tenait à me convaincre, et voici l’explication qu’il me servit, — explication, à mon avis, à ce point concluante, que depuis il m’a toujours été impossible de comprendre comment il se faisait que tous les animaux ne se prissent pas par la queue.

Chaque bête, paraît-il, a une manière