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Page:Puyjalon - Récits du Labrador, 1894.djvu/55

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RÉCITS DU LABRADOR

gisait une barge de pêche toute désemparée.

Une barge de pêche n’est pas une plume et les plus légères doivent au moins peser un millier de livres. Qui donc avait pu concevoir l’idée de transporter en pareil lieu, c’est-à-dire à vingt-cinq pieds au-dessus des hautes mers, une embarcation de cette taille et de ce poids ? Puis, dans quel but ?

Après y avoir songé quelques minutes, je renonçai à chercher plus longtemps la solution de cette énigme, et nous nous mîmes en mesure de partir. Une heure après, nous avions quitté l’anse où le brave Thomas avait failli périr de frayeur.

Il était midi lorsque je résolus de débarquer sur un îlot couvert de goëlands, dont les roches, de teintes très riches, avaient excité ma curiosité.

Nous profitâmes de cet arrêt pour dîner. Au milieu du repas, Thomas interrompit un moment le jeu de ses redoutables mâchoires pour me dire :

— Je l’ai vu, monsieur, je l’ai vu. J’ai cru que c’était un marsouin blanc, mais j’ai bien vite distingué ses yeux. Ah ! monsieur, quels yeux !

— Mais tu dormais, animal !

— Je vous crois bien, monsieur, pourtant je l’ai vu.