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RÉCITS DU LABRADOR

m’empêcherait encore de traduire toute ma pensée. Vous le savez, n’est-ce pas ? tout est relatif, et je craindrais que cette odeur, pour moi la plus épouvantablement nauséabonde, ne fut pour vous d’un charme infini. Cela pourrait provoquer la naissance de soupçons blessants pour la pureté de mon appareil olfactif et mettre en désarroi les débris de mon amour-propre.

Mais il importe peu à la mouffette — car on lui donne aussi ce nom — que vos impressions et les miennes soient discutables ou imparfaites. Elle se connaît et semble apprécier comme moi — je le dis à ma louange — la valeur de l’unique défense que la nature prévoyante ait mise à sa disposition.

Malgré tous les préjugés que ce début a dû faire naître en vous, la bête puante a eu son heure de célébrité et les plus jolies des femmes qui firent autrefois le bonheur de nos pères entourèrent leurs cous divins de boas confectionnés avec la fourrure de cet animal odorant, fort à la mode, à ces époques reculés, sous le nom de shunk ou shund.

La mouffette est de la grosseur d’un chat domestique. Son pelage est noir luisant. De chaque côté de son museau part une ligne blanche, étroite, qui va s’élargissant jusqu’à la naissance de la queue. Cette queue, qu’elle redresse en panache mena-