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DE LA NATURE

parer pour juger, et ne jouissent qu’à cette double condition. Si le plaisir est dans le jugement même que l’on porte entre l’objet à imiter et l’objet imitant ; si l’âme jouit d’autant plus, comme on le verra par la suite (paragraphe xv), qu’il y a plus à comparer et plus à juger, on comprend que, dans l’imitation par répétition identique, elle ne peut jouir de rien, puisque rien ne l’avertit qu’il y ait quelque chose à comparer, qu’il y ait à juger quelque chose.

Tel est l’effet essentiellement négatif et nul résultant, pour la faculté qui compare et pour celle qui juge, de toute ressemblance appelée identique, de toutes les manières de reproduire un objet par un objet qui ne sauroit passer pour en être l’image, puisqu’il se confond avec lui.

Ainsi, que deux vases formés par le même calibre soient placés en pendant avec deux tables calquées l’une sur l’autre, il n’arrivera à personne d’être frappé de la ressemblance des deux vases ni de la conformité des deux tables. Qu’un peintre reproduise sur la toile une de ces tables surmontée de son vase, il y aura dans cette sorte de ressemblance une vertu nouvelle qui arrêtera nos yeux. C’est qu’on est averti, par la certitude qu’en donne la toile ou le cadre, qu’il s’agit de l’image d’un objet.

Si maintenant on veut supposer que la représentation du même objet, a lieu par l’effet d’un jeu d’optique, ou que le tableau est disposé de façon à nous