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V
PRÉFACE DU TRADUCTEUR

choses. Les Romains, ces modèles de l’esprit positif, à qui lu conquête et l’exploitation du monde imposaient comme une nécessite, la vision exacte de tout ce qui les entourait, eux qui ont crée un empire par les deux réalités les plus inexorables de toutes, le droit et l’épée, ont crée aussi la superstition. L’homme qui a le plus aimé et le mieux connu leur poète national, Heyne, l’éditeur de Virgile, insiste fréquemment sur le caractère à la fois naturaliste et sombre, des mythes italiques. La contre-partie de cette loi démontre le loi elle-même. L’Allemagne, réveillée par la Prusse de son sommeil plein de rêves métaphysiques, est devenue industrielle, et a fuit de la guerre même une science dirigée vers les applications immédiates.

Indépendamment de cette loi, qui fait correspondre dans le même être un extrême à un autre, loi suffisante pour exalter chez la race anglo-saxonne les dons de création imaginative, que semblerait neutraliser son esprit positif, les faits sont là pour démontrer sa haute virtualité intellectuelle. Le plus vigoureux penseur de ce siècle est peut-être Herbert Spencer ; Darwin et Wallace ont donné à l’Histoire naturelle des siècles d’impulsion et de progrès ; l’ère de Victoria, comme on la nomme en Angleterre n’est pas moins féconde que l’ère d’Élisabeth en poètes profonds et subtils, en même temps qu’elle lui est bien supérieure en délicatesse. L’on ne voit pas même que cette ère soit séparée des précédentes par des époques de stérilité relative. Or. l’on a bien le droit de regarder une telle culture comme une manifestation extrême, une exacte compensation au