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XXV
AU LECTEUR

tal de Greenwich dans son Essai sur les effets de l’opium publié en 1763, indique dans un passage pourquoi Mead n’a pas été assez explicite dans l’exposé des propriétés de cette substance, des remèdes qui les combattent, et il s’exprime lui-même en termes mystérieux, mais φάνιρα συνετοίσί (phanira sunetoisi), fort clairs pour les adeptes : « Peut-être pensait-il que ce sujet est d’une nature trop délicate pour être éclairci à tout le monde : beaucoup de gens ayant les moyens d’en user sans réserve, cela aurait pu leur ôter cette crainte et cette hésitation qui les empêchent de faire l’épreuve des innombrables propriétés de l’opium. Car il y a dans cette substance bien des qualités dont la connaissance rendrait son usage habituel et le mettrait en faveur chez nous encore plus que chez les Turcs eux-mêmes… La diffusion de cette connaissance, ajoute-il, serait un malheur public. » Je n’admets pas sous réserve la nécessité de cette dernière conclusion, mais c’est un sujet que j’aurai l’occasion de traiter avec plus de liberté au cours même de cet ouvrage. À ce point de vue, je me bornerai à dire : 1° que l’opium a été jusqu’à présent le seul analgésique universel qui ait été révélé à l’homme ; 2° qu’il est le seul, l’unique analgésique qui soit infaillible dans une proportion extrêmement grande de cas ; 3° que sa puissance dépasse de beaucoup celle de tous les agents connus contre l’irritation nerveuse et la maudite maladie du tædium vitæ ; 4° qu’il pourrait bien être et je le pense d’après un fait absolument convaincant pour moi, le seul remède qu’il y ait, non pour guérir quand elle a éclaté, mais pour arrêter quand elle est