minable), ni le faible effort qu’elle me coûtait, après que l’habitude m’eut rendu capable de la remplir avec une aisance présomptueuse. En dernier lieu, je ne trouvais aucune facilité à exécuter cet exercice hebdomadaire, qui ne cessa jamais d’être « une épine dans la chair ». Je crois que mon tuteur, comme certaines divinités cruelles du Paganisme, respirait un parfum d’encens brûlé, en voyant l’agitation, l’irritation inquiète qu’il entretenait, comme une vestale surveille le feu sacré, par ce tourment périodique. Il éprouvait du plaisir à me poursuivre jusque dans mes songes, asile sûr même pour un paris, si bien que le dimanche, ce jour qui ouvre aux hommes, et même aux animaux, les portes du repos, était pour moi un jour de martyre. Mais après tout, il est possible qu’il m’ait rendu service, car le constitution maladive de mon esprit ne m’entrainait que trop vers le sommeil de la rêverie sans fin, et l’éloignement de la vie et de ses réalités, que je fuyait dans des abstractions chimériques.
Qu’il fût utile ou non, mon séjour chez mon tuteur tirait à sa fin. Quelques mois après le onzième anniversaire de ma naissance, Greenhay[1] fut vendu, et la maison de ma mère, enfants et domestiques, fut transportée à Bath. Pendant peu de mois, mon frère et moi nous fûmes laissés au soins de M. Samuel H…, du moins en ce qui concerne notre éducation. Quant au luxueux confortable d’une véritable demeure anglaise, nous devînmes, par une invitation spéciale, les hôtes d’un jeune ménage de Manchester, M. et Mme K… Cet événement, bien qu’il n’ait pas-eu de suites, a laissé en moi des sentiments d’une inexprimable profondeur, il forme comme une parenthèse diamantée de bonheur intime, tel que l’homme le connaît une fois, une
- ↑ Greenhay. — Maison de campagne bâtie par mon père. À l’époque de sa construction (1791 ou 1792), elle étant éloignée d’un grand mille des dernière maisons de Manchester. Mais maintenant, et même depuis longtemps, elle a été atteinte par les rapides accroissements de cette grande ville, et depuis longtemps absorbée dans son bruyant et vaste tourbillon.
