Ce n’est pas du fiel, vraiment, ce n’est pas de l’absinthe ; ce ne sont que des larmes.
Le Christ.
Mes mains sont encore trop petites pour porter
ce grand calice.
Les Rois Mages.
Un génie, dans un creux de la montagne a poli
de son marteau, pendant un milliard d’années,
cette couronne de rubis. Brama l’a mise sur
sa tête ; Memnon l’a portée après lui ; mais,
pour vous la donner, nous l’avons découronné
sur son siège de néant. Essayez-la à votre
front d’enfant.
La Vierge Marie.
Que vois-je au fond de cette couronne ? Du sang
qui dégoutte, des piquants d’épines de bois de
Judée. Mon seigneur, n’y touchez pas.
Les Rois Mages.
Ce n’est pas du sang, vraiment, ce ne sont pas
des épines de buissons ni de forêts ; ce sont
des clous d’or.
Le Christ.
Ma tête sur mon épaule est encore trop novice
pour porter cette pesante couronne.
Les Rois Mages.
Si ces présents sont trop lourds, ils vous
serviront plus tard, quand vous prendrez notre
âge. Nous en avons d’autres encore : des
amulettes pour suspendre à votre cou, des
calumets d’ambre et de gomme, les clefs
d’argent de cent villes et d’autant de
châteaux, vingt chariots remplis de brants
d’acier fourbi et d’encens, que des maures
ont cueilli sur la branche, mille idoles
de blanc ivoire avec les ouvriers qui les
ont faites, une mitre odorante de topaze,
quatre rois couleur de la nuit noire pour vous