Page:Réflexions sur la révolution de France.pdf/140

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Le Gouvernement n’est pas fait en vertu des droits naturels qui peuvent exister, et qui existent en effet indépendamment de lui. Les droits sont beaucoup plus clairs, et beaucoup plus parfaits dans leur abstraction ; mais cette perfection abstraite est leur défaut pratique. Quand on a droit à tout, on manque de tout. Le Gouvernement est une invention de la sagesse humaine pour pourvoir aux besoins des hommes. Les hommes ont droit à ce que cette sagesse fournisse à tous leurs besoins. Au nombre de ces besoins, on convient que, hors de la société civile, celui qui se fait le plus sentir est de restreindre suffisamment les passions. La société m’exige pas seulement que les passions des individus soient réduites, mais même que, collectivement et en masse, aussi bien que séparément, les inclinations des hommes soient souvent contrariées, leur volonté contrôlée, et leurs passions soumises à la contrainte. Cela ne peut certainement s’opérer que par un pouvoir qui soit hors d’eux-mêmes, et qui ne soit pas, dans d’exercice de ses fonctions, soumis à cette même volonté et à ces mêmes passions, que son devoir est de dompter et de soumettre. Dans ce sens, la contrainte est, aussi bien que la liberté, au nombre des droits des hommes : mais, comme la liberté et ses restrictions varient avec le temps et avec les circonstances, comme elles admettent l’une et l’autre des modifications jusqu’à l’infini, on ne peut les soumettre à aucune règle fixe, et rien n’est si insensé que de les discuter d’après ce principe.

Du moment que vous diminuer quelque chose des