Page:Régnier - Escales en Méditerranée.djvu/176

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secte, un craquement de brindille, le heurt lointain du marteau d’un marbrier ; rien que des tombes, des tombes, des tombes, sur lesquelles veille la garde hautaine des innombrables, des graves cyprès, éternels comme la vie, vieux comme la mort.




Nous allons aux Eaux-douces d’Asie dans un beau caïque à deux rameurs, un beau caïque aux beaux coussins de soie brodée et dont les caïdjis albanais sont tout emmousselinés de blanc. En leurs larges culottes flottantes, en leurs courtes vestes soutachées, coiffés d’une calotte ronde, ils ont fière mine, ces caïdjis. Leurs bras vigoureux font filer le caïque effilé sur les eaux rapides du Bosphore. Bientôt nous avons dépassé Kanlidja, Anatoli-Issar et sa forteresse, et nous entrons dans la rivière des Eaux-douces. Avec elle nous pénétrons dans la fraîche prairie où circule une foule animée. Elle goûte avec une joie silencieuse le plaisir de cette journée champêtre. Nous sommes arrivés un peu tard aux Eaux-douces, mais d’élégants caïques remontent et descendent encore le cours du lent ruisseau. Nous croisons des dames de harem strictement voilées, et des dames d’Europe qui s’abritent