Page:Régnier - Escales en Méditerranée.djvu/198

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des pour s’établir dans l’île de Malte. De son passé chevaleresque Rhodes a gardé des traces. Çà et là dans ses rues étroites se dressent les restes de quelque antique logis. Rhodes a conservé aussi les bastions de défense et les fossés qui le protègent. Quelques vieux canons se rouillent aux embrasures. Ce qui subsiste de la forteresse est maintenant une prison. Dans une cour un certain nombre de prisonniers traînent leurs guenilles ; d’autres travaillent et nous offrent à travers les grilles les produits de leur industrie : paniers tressés, bois sculptés, noyaux d’olives enfilés en chapelets, boîtes de paille. Le dur soleil chauffe les haillons et fait s’exhaler les fades senteurs des crasses. Ces gens sont des criminels de droit commun, meurtriers, voleurs. Quelques soldats turcs, presque aussi dépenaillés qu’eux les surveillent.




Nous avons suivi toute la longueur des remparts, leurs angles, leurs retraits. Ils dominent une vaste plaine où s’étendent de mornes cimetières aux maigres cyprès, aux stèles déjetées. C’est là que reposent les trente mille soldats turcs des armées de Soliman, les trente mille morts que coûta au Croissant le grand