Page:Régnier - Escales en Méditerranée.djvu/97

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s’éclairer dans l’air nocturne qui pèse sur elle d’un poids étouffant ; mais cette atmosphère suffocante n’empêche pas les gens de Patras d’aller et venir et de s’agiter. Les quais, les rues sont pleins de monde. Des groupes pérorent. Les cafés débordent. On va dans une odeur de poussière et de relents surchauffés. Cela sent l’ail et l’anis. Sur les tables giclent les siphons de limonade gazeuse auprès de verres de raki. On sent que ces gens doivent parler politique ou commerce. Laissons-les et allons faire un tour hors de la ville.

C’est tout de suite la campagne. La voiture roule sur une route pierreuse entre des champs obscurs. La nuit est très sombre. Parfois se lève une bouffée d’odeurs vineuses. Un profond silence nous entoure en ces lieux qui semblent inhabités. On y éprouve une sorte d’anxiété que soulage soudain l’aboi lointain d’un chien. À quoi bon aller plus loin. Retournons. Nous avons retraversé Patras ; les rues commençaient à se vider, les cafés à se dégarnir. Nous avons avec plaisir retrouvé le beau yacht blanc qui demain nous mènera vers Corinthe. Avant de descendre dans ma cabine je me suis arrêté au salon. Sur le divan, à sa place habituelle, le chien chinois dormait. À mon approche, il a ouvert un œil ; il a étendu une patte. Tout son petit corps,