Page:Régnier - Escales en Méditerranée.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

cime du Parnasse, mais je n’irai pas plus saluer Apollon et les Muses à son sommet que je n’irai à Delphes consulter la Sybille dans les gorges au fond desquelles elle rendait ses oracles, de même que je ne monterai pas à l’Acro-Corinthe boire à la source d’Hippocrène où est né Pégase le cheval ailé. Ai-je le droit de le regretter, puisque le voyage que je fais est destiné aux plaisirs de la mer, sous le regard d’Amphitrite et de Neptune ?




Ce beau et noble golfe de Corinthe, le voici donc traversé et, ce soir, un soir d’or, nous sommes ancrés tout près de l’entrée du canal qui le relie au golfe d’Egine. Quand nous sommes arrivés le passage n’était pas libre et nous sommes restés toute cette fin d’après-midi à bord. Longtemps, durant ces heures, je me suis penché sur la lisse, car le yacht reposait sur un extraordinaire champ de méduses. Innombrables, bleuâtres, opalines, irisées, elles flottaient dans l’eau transparente, dont l’insensible mouvement les balançait mollement. Leurs disques mous et comme liquoreux ondulaient au flot où l’on eût dit qu’elles allaient fondre et se dissoudre. Il y avait en elles du fantôme et du bibelot. Elles étaient