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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/220

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l’abbaye d’évolayne

éperdue qu’il eut pitié d’elle et se mit à la raisonner comme une enfant.

— Quelle folie ! vous ne m’importunez pas et je ne vous renvoie pas pour toujours. À votre tour, soyez patiente. Demain je vous reverrai après la messe conventuelle. S’il fait beau vous irez m’attendre dans les bois, sous le chêne. Je vous y rejoindrai sitôt l’office terminé et nous parlerons plus longuement. Ce soir je ne puis que vous répéter : Ayez confiance et soyez en paix. Votre mal n’est point sans remède. Le cœur a trop parlé en vous. Votre foi toute sentimentale a besoin d’être en quelque sorte reconstruite, comme une maison dont les fondations furent insuffisantes. Il faut lui donner des bases solides, l’appuyer sur la raison, sur la volonté. Vous avez voulu faire ce travail seule et c’est impossible, de là vient que vous avez cru vous perdre. Mais maintenant, moi qui vous connais mieux que vous ne vous connaissez vous-même, je serai là pour vous aider. Mon double titre de prêtre et d’époux me confère envers vous un double devoir. Peu à peu les ombres s’éclairciront. Dès ce soir, je serais surpris si vous ne sentiez pas que la grande crise est passée et que vous êtes en marche vers la lumière.

Elle écoutait avec ravissement ces paroles rassurantes. Insensiblement, elle se rapprochait de lui, jusqu’au moment où elle appuya enfin la tête contre sa poitrine. Il la prit aux épaules, à la fois pour la soutenir et pour l’écarter et comme elle pliait, défaillant sous ce contact, et qu’il voyait son regard mourir sous le sien, il la repoussa doucement.

— Avant de redescendre à l’hôtel, dit-il, arrêtez-