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Page:Régnier - L'abbaye d'Évolayne, 1951.djvu/281

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l’abbaye d’évolayne

rien. Ils devaient s’en remettre à leur imagination, inventer les quelques soulagements qui pouvaient encore lui être doux. À intervalles réguliers, ils versaient un peu d’eau entre ses lèvres desséchées, essuyaient son front trempé de sueur. Michel tenait sa main glacée, afin qu’elle eût encore dans son abandon l’impression d’une présence amie. Parfois il appuyait sa joue contre sa bouche. Et longtemps, dans la transe de sa chair atteinte, elle fut sensible à ce contact y répondit par un tressaillement. Puis ce dernier réflexe cessa. Elle ne donna plus nul signe de connaissance. La vie refluait en elle, le pouls ne battait plus. Les mains remuaient encore faiblement. Elle n’avalait plus l’eau qu’on lui donnait et qui coulait sur sa joue en un mince filet froid. Et voyant qu’il ne pouvait rien pour elle, Michel n’essayait plus de conserver l’apparence même du courage. Il gisait à demi couché sur le lit, le front sur l’épaule d’Adélaïde, la main posée sur son cœur dont il épiait les derniers sursauts, il essayait de mourir avec elle. Le père Athanase, veillant sur ces deux êtres qu’il sentait également menacés, tenta de les séparer, de rattacher celui qui devait vivre aux devoirs de la vie. Il proposa très bas, en se penchant vers lui :

— Voulez-vous dire avec moi les prières des agonisants. C’est le seul secours dont elle ait maintenant besoin.

Michel leva sur son ami des yeux atones, il fit un signe de refus doux et catégorique et murmura ces paroles étonnantes :

— Je ne suis plus prêtre ! pas même chrétien !

Un drame se jouait ici, analogue à celui qui