Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/274

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trouvez cela comique et ridicule, pas moi ! Je trouve cela gentil, très gentil, et si pareille chose se produisait à mon sujet j’en serais extrêmement touchée.

À cette déclaration de Mme  de Lérins, Antoine s’est mis à rire, d’un air goguenard et incrédule. Quant à moi, j’ai ri aussi pour cacher mon trouble. Mme de Lérins voulait-elle faire allusion à l’histoire de Mme  de Jersainville ? Mme de Jersainville lui a-t-elle raconté comment s’est terminée sa visite chez moi ? Ces pensées m’ont agité pendant toute la nuit.


Sorrente, 17 juin. — C’est notre dernière journée de Sorrente. L’Amphisbène doit lever l’ancre demain dans la matinée. Mme  Bruvannes, les Subagny et Gernon sont allés faire une promenade en voiture et Mme  de Lérins s’est jointe à eux… Moi, je suis resté à bord. J’étais fatigué, nerveux. Au lieu de demeurer sur le pont, je suis descendu dans ma cabine. J’ai fermé les rideaux des hublots et je me suis étendu sur mon lit. Comme il faisait très chaud, j’ai fait marcher le ventilateur.

Cette sorte de petite hélice aérienne m’amuse. Elle est placée à un angle de ma cabine où elle bourdonne avec une activité inutile. Elle tourne éperdument. Elle ne procure même pas une réelle fraîcheur. Elle ne produit qu’une brise superficielle, factice. Elle est mobile et immuable. Le spectacle de sa vitesse m’intéresse et m’abrutit, me