Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/35

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Il a peut-être raison, car moi qui vais rarement au théâtre, je suis entré à l’Odéon.

Je ne sais si c’est à cause du beau temps qu’il faisait dehors, mais la salle était loin d’être pleine. Le public y était même assez clairsemé. Par contre, il m’a paru excellent, ce public, attentif, complaisant, docile. Il y avait là beaucoup de jeunes filles et de jeunes gens, des couples de bons bourgeois, des dames seules, mais respectables, de vieux messieurs. Tout ce monde s’est fort amusé à l’imbroglio moliéresque. Il faut croire que Molière porte en lui-même sa vertu comique, car les comédiens ne faisaient guère valoir le texte. Ils étaient remplis de bonne volonté, mais, pour la plupart, manquaient complètement de talent. Tous, ils ignoraient à un point touchant l’art de réciter les vers. Néanmoins, je ne me suis pas ennuyé à cette parade. On éprouve toujours, du moins pour ma part, un certain plaisir à voir des gens vêtus de costumes bariolés, portant perruque et justaucorps, recevoir des nasardes et supporter des coups de bâton. C’est un spectacle qui nous change agréablement de notre vie moderne, si monotone, si compassée, et les spectateurs semblaient s’en fort divertir ; j’entendais des rires dans la salle, qui n’étaient pas une très bonne préparation aux Atrides de Maxence de Gordes et à la conférence de Gernon.

Je n’avais jamais vu Gernon et je ne le connaissais que par ses photographies. Elles ne donnent pas du tout l’idée de ce qu’il est réellement. Rien de plus drôle que de le voir à sa table de confé-