Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lui refusait de nouveau, avec un dédain marqué, de sorte que Neroli était la fable du quartier tant il y avait de ridicule à sembler être le seul garçon qui n’eût pas eu la Nina ! Il en résulta pour Neroli des railleries d’où naquirent des querelles. Neroli y reconnut les instigations de la Nina. Il comprit que le coup de couteau était au bout de cette histoire et que le mieux était de céder la place, et ce fut ainsi qu’il se décida à venir tenter la fortune à Paris…

Au fond, Pompeo Neroli n’est pas à plaindre. Il voulait la Nina, il l’a eue…


23 janvier. — « Comme on vous voit rarement, monsieur Delbray. »

C’est la douce voix de Germaine Tullier, devant qui je m’incline, qui m’adresse ces paroles avenantes. Mlle  Tullier est une charmante personne. Elle a vingt-cinq ans. Elle est petite, de joli visage et de taille élégante, avec un air de franchise et de bonté. Le docteur adore cette fille de son frère, qu’il a élevée, car ce frère, Ernest Tullier, l’explorateur, a passé la plus grande partie de son existence au fond de l’Afrique, avant d’y périr dans une embuscade de nègres. Germaine Tullier a donc grandi auprès de son oncle et de sa tante. Mme  Tullier lui a servi de mère, car elle n’a jamais connu la sienne, Ernest Tullier ayant eu cette enfant d’une liaison passagère et sans lien légal. Certes, la mort de son père fut douloureuse à Germaine Tullier,