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Page:Régnier - Portraits et Souvenirs, 1913.djvu/20

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l4 PORTRAITS ET SOUVENIRS

site même prouvât que Laclos avait touché juste puisque ses masques s’appliquaient à tant de visages et que ses portraits convenaient à tant de modèles.

Néanmoins, la tradition qui veut à l’origine des Liaisons dangereuses une histoire et des figures du temps a duré, mais au lieu de les chercher parmi les anecdotes illustres et les gens en vue, on a compris que l’on trouverait plutôt, comme point de départ à cet étrange livre, quelque aventure discrète ou quelque personnage obscur. On avait raison, et c’est ce que confirme une curieuse page des Mémoires du Comte de Tilly où Laclos lui- même avoue qu’il peignit son Valmont d’après un ami de régiment, « jeune homme né spécialement pour les femmes », et que ce fut à Grenoble qu’il vit l’original de sa Merteuil en une Marquise de L. T. D. P. M. Elle s’appelait Mme de Montmort, au dire de Stendhal, qui se souvenait de l’avoir connue, quand il était enfant, boiteuse, et qu’elle lui donnait des noix confites.

Laclos se serait donc servi d’originaux pour son roman. Ce procédé d’imitation est souvent familier aux romanciers qui ne le sont point de profession. Il est assez probable que Laclos eut recours à une sorte de calque qui lui fournissait le dessin vrai de ses figures. Il y ajouta les couleurs et les expressions, et ce fut, soutenu par cet appui solide