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LA DOUBLE MAÎTRESSE

dans une sorte de tonnelet capitonné, entre les feuilles d’un paravent, M. de Portebize vit une forme vaporeuse et emmousselinée et un fin visage où il reconnut, en esquisse et comme lointain, le sourire qui l’avait charmé aux lèvres mêmes d’Ariane.

— « Ah ! le voilà ! s’écria la grosse voix enrouée du chevalier de Gurcy, qui, venant à M. de Portebize, l’embrassa à plusieurs reprises. Ah ! le voilà ! permettez-moi, mon cœur, de vous le présenter.

— J’espère, Monsieur, que vous ne vous ennuierez pas trop en notre compagnie, puisque le chevalier prétend que vous supportez la sienne, qui est bien la plus importune que je sache ; mais il est bon garçon et on vous le passe. Vous connaissez sans doute M. de Gurcy depuis longtemps ?

— Pardi ! riposta le chevalier, de tout temps, il y a plus d’un mois que nous ne nous quittons guère. Je l’ai rencontré chez les filles où votre rigueur m’avait conduit et où son goût le menait, car il n’a point d’affaire en règle. Ma mère, qui en est folle, en voudrait bien une avec lui, et, s’il s’y dérobe plus longtemps, c’est avec moi qu’il l’aura.

— Voyons, Gurcy, trêve de folies ! nommez votre ami à ces messieurs et donnez-moi ma boule à mains qui chauffe au foyer. »

M. de Gurcy obéit et apporta, avec des grâces d’ours, une petite bouillotte d’argent qui tiédissait sous la cendre.

Mlle Damberville était frileuse. En hiver, sans