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LA DOUBLE MAÎTRESSE

souper, et qui en accuse M. Tobyson, à cause des santés que ce dernier lui porta et auxquelles il crut devoir répondre, n’eut de cesse que j’eusse proposé de sa part à l’Anglais une revanche de bouteilles. M. Tobyson accepta. Hier donc, je leur fis dresser une table chez moi ; je la fournis de vins, enfermai les deux rivaux, puis sortis me promener. J’allai jusqu’au Jardin du Roi voir des petits chiens de la Chine qui y sont depuis peu. Ce sont des bêtes singulières. Ils ont le corps glabre et faisandé de truffes et comme pourri, les oreilles mignonnes et cartilagineuses, et ils semblent fondus en du bronze tiède. J’en oubliai mes deux buveurs et rentrai fort tard. Je fis ouvrir. M. Tobyson avait dû se mettre à l’aise pour mieux boire, car je le retrouvai dormant roulé tout nu dans la nappe. Quant à Gurcy, il était à moitié mort. Je le fis rapporter chez lui ; aussi je doute que nous voyions l’un ou l’autre à l’Opéra, car je les crois peu en état de paraître où que ce soit ; mais je n’en irai pas moins applaudir aux débuts de la protégée du bon abbé. Et que devient donc M. Hubertet ?

— Le bonhomme est fou de joie, dit en riant M. de Clairsilly, il court chez le costumier et de là passe chez la coiffeuse et se rend ensuite chez la parfumeuse. Je l’ai rencontré tout à l’heure ; il portait dans un mouchoir ses plus belles médailles qu’il allait vendre et un carton vert qui contenait une parure de fleurs pour Fanchon. »

M. de Bercherolles puisa délicatement dans la tabatière ouverte que lui tendait M. de Parmesnil. Ces messieurs, tout en causant, étaient arri-