Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/337

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sulté voyait là une fortune sûre et discrète et justement ce qu’il leur fallait. M. de Galandot lui semblait en tous points providentiel et, quoique le compère eût rabattu le nécessaire aux propos de Cozzoli dont l’imagination surexcitée faisait de M. de Galandot rien moins qu’un prince déguisé, il en restait tout de même que, réduit à sa valeur exacte, le bon gentilhomme était riche, simple et déjà barbon. En y réfléchissant, il y avait bien quelque risque qu’il fût bizarre et atrabilaire, étant donnée la façon dont il vivait à Rome depuis plusieurs années, si retiré qu’il avait mis en défaut le flair d’Angiolino et échappé à son affût. Mais, en y pensant mieux, ces précédents prouvaient que son goût brusque et inattendu pour la signora devait être d’autant plus vif qu’il contrastait davantage avec des mœurs établies déjà par une longue habitude et dont il avait fallu, pour le détourner, une circonstance tout exceptionnelle.

Il se présentait donc là, comme en jugeait sagement Angiolino, une fort belle matière, pour une femme, à exercer ses talents. La solitude même où se trouvait M. de Galandot le rendait mieux propre à être aisément circonvenu. De plus, Cozzoli répondait de sa mine, disant qu’il n’eût tenu qu’à lui de faire de M. de Galandot un seigneur élégant. Mais Nicolas, malgré les instances du tailleur, ne voulut point consentir à se laisser habiller à neuf d’une façon qui convint à son nouvel état d’amoureux.

Ce fut donc, son habit gris au dos, sa grosse perruque aux joues, ses souliers à boucles aux