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tristesses du scorbut à bord ! combien senties et vraies les impressions morales du marin ! Jamais il ne parle de sa conduite personnelle ; pas une pensée d’orgueil n’apparaît ; cependant n’était-il pas au plus fort de la mêlée, celui qui en retrace les phases avec tant de vivacité[1] ?

Jusqu’ici nous avons suivi l’ordre chronologique fourni par le dossier officiel et imprimé par Garneray lui-même. Le 21 octobre 1845 il s’adressait, en effet, au ministère de la marine pour réclamer ses états de service et, la réponse n’ayant sans doute mentionné que son embarquement sur la Forte, il écrivait de nouveau deux mois plus tard, de Nice, le 29 décembre :

« Puisque mon embarquement à bord de la Forte est constaté, je pense qu’on pourra facilement trouver les autres au moyen des renseignements suivants : Je fis deux croisières successives sur la Forte… Près de Batavia nous prîmes le navire anglais le Pigot[2] sur lequel je fus mis, et je ne sais combien de mois après nous arrivâmes à l’Île de France. Presque immédiatement je fus embarqué sur le Brûle-Gueule (Brest, 1797)[3], capitaine Bruneau de la Souchais. Après une longue croisière, je passai sur la Preneuse, capitaine Lhermitte, détruite dans la baie du Tombeau (Île de France). »

Mais à ce moment une lacune se produit. Une des feuilles du dossier officiel contient cette observation en marge : « Les rôles d’équipages des divers corsaires à bord desquels le sieur Garneray aurait servi dans l’Inde, de 1799 à 1805, ayant été perdus par suite de la prise et de la perte desdits bâtiments, les archives centrales de la marine se trouvent dans l’impossibilité de pouvoir déterminer la durée de ses services. »

La succession des faits peut cependant être à peu près reconstituée grâce à d’autres documents du dossier qui enregistrent plusieurs embarquements successifs.

La Preneuse a succombé le 28 décembre 1799. À cette époque

  1. Une gravure de Garneray représentant l’affaire de la Preneuse accompagne son article dans la France maritime, t. I, p. 316. Cette vue fut prise pendant le combat par ordre du capitaine Lhermitte.
  2. Cette capture du Pigot est racontée par Garneray dans les Scènes maritimes, t. II, p. 115.
  3. Le dossier, en précisant les dates, établit que Garneray ne passa sur le Brûle-Gueule que le 27 avril 1798.