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ce que je vous dis, ne peut finir que fort mal. Nos pères, sauf votre respect, n’étaient pas plus mauvais marins ni plus bêtes que nous… Or, c’est eux qui ont fait et nous ont laissé cette remarque. Au reste, quelque savant que vous soyez, vous me permettrez de m’en rapporter autant à l’expérience qu’à votre éducation, n’est-ce pas ? Eh bien, jamais, au grand jamais, il n’y a eu un exemple qu’un navire, après avoir perdu son chat, soit arrivé à bon port. Un amiral me soutiendrait le contraire, que je lui dirais : « Mon amiral, vous êtes un amiral, mais il y a des choses qui sont au-dessus de votre intelligence !… par exemple, vous ne vous connaissez pas en chats !… » Puis, voyant approcher une tempête : « Voyez-vous, lieutenant, redit Combaleau, ce malheur vient de la mort du chat ; c’était écrit là-haut, nous ne pouvions l’éviter. »

Que ce soit le chat ou que ce ne soit pas le chat, toujours est-il que la Doris périt dans un naufrage et que notre Garneray passa sur un radeau quatre jours dont les souffrances pourraient être comparées à celles des naufragés de la Méduse.

Enfin, il aborde à Saint-Denis et nous pouvons achever de lire sa lettre : « La frégate l’Atalante expédiée par la France étant venue mouiller à Saint-Denis (île Bourbon), j’obtins de passer à son bord.[1] On sait que cette frégate s’étant perdue au cap de Bonne-Espérance[2], je passai à bord de la Belle-Poule[3], que je fus pris à son bord[4], que je revins des prisons d’Angleterre à Cherbourg à bord d’un brig de guerre, environ quinze jours après l’arrivée de Louis XVIII[5]. Il m’est impossible de donner des renseignements plus exacts et plus circonstanciés que ceux-ci sur le temps que j’ai passé au service de la marine française… tous mes papiers ayant été perdus à bord de la Belle-Poule par suite de ma blessure. »

Une phrase de Garneray, citée par l’auteur anonyme d’un

  1. Il y fut aide-timonier à 36 francs, du 30 août au 6 novembre 1805 (Documents officiels).
  2. Il se sauva sur une épave. Dans le t. II des Scènes maritimes, p. 165, il raconte la tempête où se perdit l’Atalante, capitaine Lalanne.
  3. Le 7 novembre 1805, avec le même titre d’aide-timonier, jusqu’au 13 mars 1806 (Documents officiels).
  4. Le 14 mars 1806. — La Belle Poule faisait partie de la division de l’amiral Linois (V. Scènes maritimes, t. II, p. 242).
  5. Le 18 mai 1814.