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mémorable journée, on savait combien ses connaissances nautiques et son habileté dans la peinture le rendaient apte à cette double et pénible tâche. Son tableau prouve à quel point cette confiance était méritée. Nous nous garderons d’entrer dans les détails immenses où nous entraînerait la description de cette production remarquable qui occupe une toile de treize pieds de long sur une hauteur proportionnée. Nous nous bornerons à dire que l’artiste a fait entrer dans cet étroit espace et l’action toute entière et les lieux qui en furent le théâtre. C’est pour ainsi dire le portrait ou plutôt le bulletin officiel de ce grand fait d’armes… Les innombrables figures qui couvrent les vaisseaux sont malgré leur petitesse, exigée par la distance, pleines de mouvement et d’énergie ; toutes combattent, manœuvrent, sont à leur poste… Dans le beau groupe de Turcs… tout est parfait, dessin gracieux, couleur chaude et brillante, facilité d’exécution, costumes, physionomies, nationalités… M. Garneray sait peindre jusqu’au moral des peuples… »

Avec les expositions annuelles successives nous arrivons à l’année 1832. Descamps[1] était conservateur du musée de Rouen, mais il avait quatre-vingt-dix ans et se voyait dans l’obligation de résigner ce poste qui fut alors mis au concours. Dans les premiers jours de septembre, Garneray posa sa candidature par une lettre adressée à Henri Barbet[2], maire de Rouen, où il énumère les titres qui justifient sa demande : commandes du gouvernement, médailles obtenues à Paris, à Douai, publication des Vues des ports de France, etc.[3].

Le 15 septembre, nouvelle lettre que nous citerons textuellement car elle donne d’utiles renseignements ; n’a-t-elle pas aussi son petit cachet d’époque ?

« En recevant la lettre par laquelle vous m’avez fait l’honneur de m’annoncer que je pouvais exposer à l’hôtel de ville les tableaux

  1. Descamps (Jean-Baptiste-Marc-Antoine), 1742-1836. Conservateur du musée de Rouen, 1809-1832. — Catalogue raisonné des tableaux exposés au Musée de Rouen, 1809, ouvrage souvent réimprimé. Son père, J.-B. Descamps, avait créé à Rouen une école gratuite de dessin.
  2. Barbet (Henri), 1789-1875. Maire de Rouen, 1830-1837 ; député, pair de France, grand-officier de la Légion d’honneur.
  3. Il donne comme adresse l’hôtel Vatel, où il était descendu. À Paris, il habitait alors rue Saint-Pierre-Montmartre, 15.