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Rivières, de riches gisements. Enfin et surtout il insistait pour qu’on multipliât les envois de colons, afin de diminuer l’écart qui se faisait déjà si sensible entre la population de la Nouvelle-France et celle des colonies anglaises qui venaient de s’agrandir encore par L’annexion de Manhatte et de la Nouvelle-Belgique prises aux Hollandais et devenues la Nouvelle-York (1665).

Il est regrettable que ces vues si sages n’aient pas été mieux accueillies à la cour de Versailles. Nos historiens ont généralement surfait le génie de Colbert. Ministre assurément consciencieux, laborieux et méthodique, — le plus grand des commis d’État, — mais bien inférieur à un Sully par exemple ou à un Turgot, Colbert n’eut jamais ce coup d’œil d’aigle qui domine une situation et sait en prévoir à l’avance et en régler les péripéties. Il ne dépassa, sur aucun point, ni ne contraria les idées de son temps. On sait qu’il ne fit rien pour empêcher les effets à jamais funestes pour notre pays de la révocation de l’édit de Nantes. Il ne fit pas davantage pour donner à nos possessions coloniales cette vigoureuse impulsion qui eût pu, à ce moment et plus sûrement que toutes les guerres de Louis XIV, nous assurer l’hégémonie du monde. Aux pressantes demandes de l’intendant Talon, Colbert répondit « qu’il ne serait pas prudent de dépeupler la France pour peupler le Canada, que l’émigration devait être graduelle, qu’il ne fallait pas y faire passer plus de colons que le pays défriché ne pouvait en nourrir », etc… — Le résultat de cette belle prudence fut celui qu’avait prévu Talon : l’infériorité de notre colonie, et plus tard sa perte !

Colbert ne fit rien non plus pour améliorer le système