Aller au contenu

Page:Raban - Justine, ou Les malheurs de la vertu, 1836.djvu/103

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
89
LA MAISONNETTE.

son ? obéis et ne raisonne pas. Tu as de l’intelligence ? mauvais soldat ! c’est un défaut dont on te corrigera, car les baïonnettes ne doivent pas être intelligentes ; et tu n’es, toi, que le manche d’une baïonnette. J’aurais cent fois risqué ma vie pour échapper à cette mort morale ; nous étions en route pour nous rendre au dépôt, lorsque je partis sans autre permission que ma volonté : je revins auprès de ma bonne mère qui me pleurait, et dont je séchai les larmes. Mais il ne suffisait pas d’avoir recouvré ma liberté, il fallait songer aux moyens de la conserver. Ma mère vendit tout ce que nous possédions ; nous quittâmes la province où nous avions été heureux, et nous vînmes ici où nous vécûmes pendant quelque temps fort tranquilles. Je m’étais promptement fait connaître comme peintre dans les environs ; le prix de mon travail, quoique bien mince, était suffisant pour satisfaire à tous nos be-