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le vieux cévenol.

barbare, armé d’une corde goudronnée[1]. »

Cette image effrayante poursuivait partout le malheureux Ambroise. Quelquefois il espérait que, par des sollicitations et des amis, il pourrait arracher son oncle à sa fatale destinée, et, se complaisant dans cette idée, elle adoucissait sa douleur ; d’autres fois, perdant toute espérance, il voulait aller prendre la place d’un oncle qui lui semblait plus nécessaire à sa mère que lui même[2]. La santé d’Ambroise fut très altérée par cet événement, et, sans doute, il aurait succombé à son affliction, si ce même avocat, qui lui avait donné autrefois de si bons conseils, ne fût venu à son secours. Personne ne savait mieux que lui comment on adoucit la sainte sévérité de certains hommes, et combien il est d’heureuses

  1. Tel était le zèle de nos pères contre ces hommes dévoués : par les lois pénales, que les forçats protestants étaient traités. plus rudement que les criminels. Les places les plus fatigantes étaient pour eux. Si, à l’élévation de l’hostie, lors de la célébration de la messe (sur la galère), ils n’ôtaient point leur bonnet, on les étendait nus sur le coursier, et un comite, armé d’une corde goudronnée et trempée dans l’eau de la mer, les frappait de toute sa force. Les côtes retentissaient sous la violence des coups, la peau se déchirait en lanières sanglantes, et on emportait ces malheureux, à demi morts, à l’hôpital, où l’on prenait soin de les guérir pour recommencer leur supplice.
  2. C’est de nos jours (1er janvier 1756), que le jeune Fabre obtint d’être conduit aux galères à la place de son père.
    On ne peut lire l’Honnête criminel sans être attendri jusqu’aux larmes, et sans en estimer l’auteur (Fenouillot de Falbaire).